De nouveaux éléments sur le bienheureux Michel Sopocko
Le 14 décembre 2008 – Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
Souvent l’Église a expérimenté dans les temps difficiles de son histoire que Dieu lui fait le don de personnes saintes qui doivent l’aider à découvrir les vérités oubliées, la pousser à se renouveler, la défendre devant l’érosion du divin par les vagues de ce qui est temporel. La sainteté est un don que Dieu offre à chacun de nous. Tout le monde peut être saint, mais tout le monde ne veut ou ne peut le devenir. Tout dépend de combien nous profiterons de la grâce divine et de combien nous accepterons Son invitation à être saint. Autrement dit tout dépend de ce que l’homme aimera le plus. Si quelqu’un aime la renommée, il lui est difficile de vivre dans le secret ; s’il aime l’argent et la vie fastueuse, il lui est difficile de comprendre et d’accepter le don de la pauvreté. Nous portons souvent en nous une image un peu déformée de la sainteté, nous la voyons comme un état anormal où il faut se flageller et se priver de nourriture. Cependant la sainteté n’est pas une prédilection pour le masochisme. Pour donner quelque chose à Dieu, il faut d’abord L’aimer. Nous ne faisons pas de dons à quelqu’un que nous ne connaissons pas et nous sommes prêts à tout donner à celui que l’on aime. Et puis, pour être saint, il n’est pas du tout nécessaire d’être pauvre. Nous connaissons beaucoup de saints, ou ne serait-ce que des personnes pieuses, qui possèdent également de nombreux biens matériels. Car ce qui compte c’est que Dieu soit toujours à la première place, que nous Le vénérions Lui et non pas les biens que nous avons créés, des biens qui doivent nous servir. C’est pourquoi ne nous étonnons pas, les saints ont connu Dieu, ils L’ont aimé et ils sont prêts à tout Lui donner, eux-mêmes y compris. Nous devrions plutôt les envier, nous sommes tellement absorbés par le temporel que nous ne sommes capables de rencontrer Dieu que sur un tableau accroché au mur ou sur une croix au bord de la route ; notre regard ne va pas plus loin, car nous nous préoccupons que de ce qui est temporel.
Le saint est l’un de nous. C’est quelqu’un qui par son exemple nous incite à chercher Dieu et il témoigne que cela vaut la peine, que cela ne dépasse pas nos possibilités et que c’est la meilleure recette pour atteindre le véritable bonheur que le monde ne peut nous donner.
L’une de ces personnes est le père Michel Sopocko, candidat aux autels qui a été béatifié le 28 septembre 2008 à Bialystok en Pologne. C’est Mgr Angelo Amato, envoyé du saint-Père Benoît XVI qui a procédé, à la béatification du Père Michał Sopoćko. C’est le Cardinal Stanisław Dziwisz qui a prononcé l’homélie pendant la sainte Messe.
Un homme et un prêtre ordinaire, un fils de la campagne polonaise pleine de défauts mais également d’une fervente religiosité. Il naît en 1888, le jour de la Toussaint. Après avoir achevé ses études secondaires, il entre au Grand Séminaire de Wilno (aujourd’hui Vilnius en Lituanie) et il reçoit l’ordination sacerdotale en 1914. Après des études à l’Université de Varsovie, il obtient un doctorat et une habilitation. Il n’est pas seulement un universitaire, l’auteur de nombreux travaux dans le domaine de la théologie pastorale, de la pédagogie ou de la catéchèse. Après son retour à Wilno en 1924, il est également connu comme un pasteur zélé, il œuvre contre l’alcoolisme et dans le domaine social. Là où il s’illustre le plus c’est comme fervent éducateur des séminaristes, confesseur des sœurs et prêtre soucieux de la gloire de Dieu.
C’est lui que sainte Faustine rencontre sur sa route. Quand elle arrive au couvent de Wilno en 1933, c’est le père Michel que le Christ lui indique pour l’accompagner dans son œuvre apostolique qui est de rappeler au monde que le plus grand attribut de Dieu est la Miséricorde Divine. Faustine lui confie ses révélations et ses conversations mystiques avec le Seigneur. Comme il l’avouera lui-même, au début il voulait fuir, oublier ce qu’il avait entendu, mais à la fin il commença à se demander comment Faustine, simple et sans instruction, sachant à peine écrire, pouvait connaître des vérités approfondies par les théologiens. Il trouva l’idée de la miséricorde comme plus grand attribut de Dieu chez saint Augustin et saint Thomas d’Aquin. Il comprit alors que ce que disait Faustine ne venait pas d’elle. Il lui demanda d’écrire les paroles du Seigneur, et c’est ainsi que nous avons reçu en don son « Petit Journal ». Le père Sopocko commença lui-même à étudier la problématique de la miséricorde à partir des textes bibliques et liturgiques. Il donna aux révélations de Faustine un cadre théologique et, pas à pas, il commença à pénétrer ce thème et à découvrir la véritable signification du message transmis à sainte Faustine par Jésus. Il n’aurait bien sûr pas pu accomplir tout cela si, outre sa solide préparation universitaire, il n’avait pas été un homme d’une foi profonde et de profonde communion avec Dieu. Il devint comme le porte-voix de sainte Faustine par ses publications, ses homélies et même ses émissions de radio. Il propageait également le tableau de Jésus Miséricordieux peint en 1934 selon les indications de Faustine, et le Chapelet à la Miséricorde Divine. C’est de lui que parlait Jésus quand II assurait à Faustine qu’après sa mort l’affaire ne disparaîtrait pas : « Sa pensée est étroitement unie à ma pensée, sois donc sans crainte pour ce qui est de mon œuvre je ne le laisserai pas se tromper, et toi ne fais rien sans son autorisation » (PJ 1408). Après la mort de sœur Faustine il resta seul, pleinement conscient que tout le poids de la transmission du message de la Miséricorde Divine reposait sur ses épaules. Après la guerre, Wilno se retrouva hors du territoire polonais, il s’installa alors à Bialystok où il continua à travailler comme professeur au Séminaire, comme prêtre, universitaire et avant tout comme apôtre de la Miséricorde Divine. Durant cette période le Message se trouva en danger ; dans certains cercles de l’Église les révélations de sœur Faustine commencèrent à être traitées comme non conformes à l’enseignement de l’Église ; on recommanda même de retirer les tableaux de Jésus Miséricordieux qui commençaient à apparaître dans les églises. En 1959 fut porté le coup le plus grave : l’interdiction de propager le culte de la Miséricorde Divine selon les révélations de sœur Faustine. Cela ne brisa ni ne découragea le père Sopocko. Il continua à écrire, convaincre et confier toute l’affaire à Dieu. Il était persuadé que si elle venait de Dieu, tôt ou tard elle s’achèverait positivement. Il ne pouvait se soumettre car il se souvenait des paroles qui avait été dites à son sujet à sœur Faustine : « Grâce à son action, une nouvelle lumière va briller dans l’Église de Dieu pour la consolation des âmes » (PJ 1390).
Aujourd’hui nous pouvons dire que sa peine et sa confiance en Dieu ont porté des fruits. Trois ans après sa mort (il est décédé le 15 février 1975), le Siège Apostolique a retiré l’ancienne interdiction. Par les doutes humains, l’œuvre de la Miséricorde a traversé avec succès sa période d’essai. Aujourd’hui le message de la Miséricorde Divine devient une nouvelle espérance pour le monde. Après la béatification et la canonisation de sainte Faustine par le pape Jean-Paul II, est venu le tour du père Michel, lui qui s’est tenu comme dans l’ombre mais qui a collaboré si fructueusement avec la grâce divine dans l’œuvre de la propagation du culte de la Miséricorde Divine. De la biographie de cet humble prêtre qui s’est totalement consacré à la cause de Dieu, découle également pour nous un enseignement important. Il vaut la peine de réaliser ce que dans notre vie nous percevons comme notre vocation, il vaut la peine de faire des efforts même si l’on ne voit pas les effets de notre travail. Dans la vie nous devons être comme des semeurs qui sèment le grain qui portera des fruits quand Dieu décidera qu’il en est temps. Peu importe que nous soyons laïcs ou consacrés, ce qui est important c’est de sans cesse apprendre à déchiffrer la volonté de Dieu en accomplissant consciencieusement et honnêtement ce qui nous revient. Le bien fait par amour pour Dieu et le prochain ne demeure jamais infructueux. Prenons donc exemple sur ce semeur zélé et adressons-nous à lui comme bienheureux, afin qu’il nous obtienne les grâces dont nous avons besoin et surtout la grâce de la confiance en la Providence et la Miséricorde Divine sur les chemins tortueux de notre vie.
Père François